Aujourd’hui, alors qu’émergent de multiples replis identitaires remettant en cause jusqu’à l’appartenance à l’Union Européenne de certains de ses membres, nombreux se posent la question de ce qui peut, au-delà des intérêts économiques et de la volonté d’éviter autant que possible les conflits entre nations, encore unir les européens.
L’un des pères fondateurs de l’Europe, Jean Monet aurait dit : « Si c’était à refaire, je commencerais par la culture ». En effet, il aura fallu plus de 40 ans pour que la culture soit considérée comme une dimension essentielle de l’identité européenne. Et d’en déduire la nécessité de la réalisation d’une Europe de l’Art et de la Culture, bien après le marché commun, la libre circulation des biens et des personnes, la question des frontières. Or, quels sont les acteurs de cette Europe de la Culture si ce n’est les artistes ? Peut-on imaginer que nous ne participions pas à son élaboration et que nous ayons ensuite à subir du droit et des règles définies pour notre activité professionnelle : la création qui est notre quotidien et dont nous connaissons tous, les joies mais aussi et surtout les difficultés. Pour éviter cela, il est essentiel que les artistes envoient un signal fort signifiant leur volonté d’être au cœur de cette Europe de la Culture et en capacité de répondre à la complexité du métier d’Artiste face aux problématiques européennes actuelles.
C’est pourquoi la Maison des Artistes souhaite initier la création d’une Union des Artistes des Arts Visuels de l’Union Européenne : l’UEVA, Union européenne des Arts Visuels (en français). Elle a pour objectif d’être présente sur la scène européenne et de faire valoir la position des créateurs comme interlocuteurs privilégiés du pouvoir politique européen, et ce dans chaque état de l’UE. Il s’agit de travailler à la structuration professionnelle de l’ensemble des professionnels des arts visuels et plastiques des pays membres. Mais aussi à la visibilité, à la reconnaissance et à la mise en valeur du rôle essentiel des artistes contemporains sur le périmètre européen.
Ce projet se construit en respectant et promouvant la diversité, sans chercher à faire table rase des singularités nationales si fortement inscrites dans l’histoire comme nous y renvoie la très belle tradition du « grand tour ». Un centralisme bruxellois n’est pas le but recherché, contrairement à ce qui existe déjà en termes de politique culturelle à la Française, c’est à dire promue et contrôlée par l’Etat. Il ne s’agit pas de se construire contre, que cela soit vis à vis d’une prédominance sur le marché de l’Art, des USA ou des pays asiatiques, par exemple, mais plutôt dans un esprit d’ouverture – ou plus exactement de réouverture – d’un espace où les cultures des pays d’Europe pourraient, plus qu’aujourd’hui, se féconder dans la réciprocité. Et, par le surcroît de vitalité ainsi engendré, nous entendons contribuer à lutter contre le déclin général du marché de l’art dans l’Union européenne.
Quel est l’enjeu réel d’une telle fondation ? En premier lieu, bien sûr : veiller sur les conditions fiscales, sociales, matérielles et morales du statut particulièrement fragile de l’Artiste. Mais il s’agit aussi de créer un levier politique de veille, de défense de nos intérêts communs, de devenir une force de proposition, incluant une dimension prospective : Intelligence Culturelle et Artistique pour amener en quelque sorte un pendant à l’Intelligence Economique ou encore l’Intelligence Artificielle.
L’UEva sera donc un outil au service de tous les artistes européens, destiné à les représenter face aux divers pouvoirs politiques en place. La diversité constituée par les différences entre chaque pays sera la richesse de cette Union. Par ailleurs, l’apport de chacun permettra de mieux comprendre et comparer les situations des Artistes professionnels dans chaque pays. Cette comparaison ouvre sur une évolution du statut de l’Artiste autant sur le plan national que, prioritairement, sur le plan Européen, réalisant en somme un rassemblement de pensée, d’échange et d’écoute autour de problématiques communes à tous les Artistes en Europe.
Quelle est la réalité des artistes vivants ? Comment ressentent-ils et vivent-ils leur profession au quotidien dans leurs pays respectifs ?
Il y a 10 ans, la MdA a organisé la 1ère convention européenne. Cet énorme travail, réalisé en collaboration avec un grand nombre de pays de l’UE, a permis l’élaboration d’un livre blanc rendant compte de l’Etat des lieux de la situation des artistes des arts visuels sur le périmètre européen.
C’est déjà un excellent outil de travail mais qui date d’il y a 10 ans. Depuis, de nombreuses avancées ont sans doute eu lieu. Il nous faut identifier les manques et nous inscrire dans ces « lacunes ». Il nous faut trouver des sujets qui soient fédérateurs, qui fassent union et créent une synergie, de l’extrême nord à l’extrême sud de l’Europe actuelle.
Nacéra Kainou
Présidente de la Commission Relations européennes et internationale.
– Vous pouvez répondre au questionnaire sur vos pratiques et les règles sociales et fiscales en Europe ici, votre participation compte !
– Téléchargez le Compte Rendu de la première réunion UEva
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